Un monde sans lèpre ? : c’est possible !
En 1873, le médecin norvégien Gerhard Armauer Hansen mettait en évidence pour la première fois le germe responsable de la lèpre qui porte encore son nom : Mycobacterium leprae ou Bacille de Hansen. Maladie millénaire connue depuis l’antiquité, la lèpre continue pourtant de nous défier. En effet, des zones d’ombres persistent dans la connaissance de cette maladie liée à la pauvreté.
Parce que la lèpre atteint les populations rurales pauvres et sans voix, on peine à mobiliser les ressources pour une lutte d’envergure contre cette endémie. Les victimes continuent de souffrir dans l’indifférence et dans la solitude. Classée aujourd’hui par l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) parmi les maladies tropicales négligées, la lèpre continue, chaque année, de défigurer des centaines de milliers de personnes. Pourtant depuis les années 80, un traitement efficace existe. Cependant l’insuffisance du dépistage et la faiblesse des systèmes de santé des pays endémiques conduisent à une persistance de la transmission de cette maladie.
Peut-on se réjouir d’une diminution du nombre de nouveaux cas ?
Le dernier relevé épidémiologique de l’OMS vient encore de confirmer la triste réalité : 127 396 nouveaux cas de lèpre dont 7198 porteront définitivement dans leur vie des infirmités irréversibles au niveau des yeux, des mains et des pieds ; 8629 sont des enfants. Ce nombre de nouveaux cas est en diminution de 37,1% par rapport à l’année précédente. Faut-il s’en réjouir ? Non ! Car les contraintes induites par la pandémie Covid-19 ont interdit l’organisation des indispensables campagnes de dépistage et de prise en charge des cas de lèpre. Ces cas non dépistés continueront non seulement d’entretenir la transmission de la maladie dans les communautés pauvres où la lèpre sévit, mais ils risquent d’être plus graves. En effet, cette maladie mutilante commence d’abord par une simple tache insensible au niveau de la peau, mais lorsque la maladie n’est pas dépistée et soignée à temps, elle détruit les nerfs. Des paralysies irréversibles et des mutilations au niveau des yeux des mains et des pieds s’en suivent : les victimes s’enfoncent alors dans une abjecte exclusion.
Malgré cette situation préoccupante, l’espoir est permis.
Les principaux acteurs de la lutte contre la lèpre ne baissent pas les bras : un partenariat mondial « GPZL : Global Partnership for Zero Leprosy » a été mis sur pied. Objectif : mobiliser les ressources et les moyens pour briser le cercle vicieux de la transmission de la maladie et atteindre l’objectif ambitieux de parvenir à un monde débarrassé du fardeau de cette maladie.
Il nous faut mobiliser des ressources pour former le personnel de santé des pays d’endémie au diagnostic et à la prise en charge des malades, organiser des vastes campagnes de dépistages dans les communautés rurales pauvres, développer des programmes de soins au profit de celles et ceux qui portent déjà dans leur chair les stigmates de la maladie ; développer des programmes ambitieux de recherche pour de nouveaux traitements plus efficaces et plus robustes, développer des vaccins, lutter contre la stigmatisation liée à la maladie et donner un espoir à ceux qui en sont déjà atteints par des programmes pertinents de réinsertion sociale.
En résumé, la stratégie est parfaitement élaborée :
- un traitement efficace appelé polychimiothérapie qui est disponible et peut être administré aux patients.
- les directives pour dépister, prévenir et soigner les complications dans les communautés rurales pauvres où la maladie sévit ont été élaborées et validées.
- les priorités de recherche pour atteindre l’objectif ambitieux ont été définies.
- l’analyse de la situation dans les principaux pays et les plans réalistes pour atteindre l’objectif de zéro lèpre ont été établis.
Ce qui fait défaut ? : la mobilisation générale et les ressources !
Tous ensemble nous pouvons travailler pour léguer à l’humanité un monde débarrassé du fardeau de cette maladie millénaire.
A l’image de Raoul Follereau, nous appelons à un sursaut : décideurs politiques, donateurs, scientifiques, acteurs des systèmes de santé, organisations de la société civile, nous devons tous nous mobiliser pour dire non à l’inacceptable. Un monde sans lèpre reste un objectif réaliste et atteignable « Avec l’Amour l’impossible devient possible ! »
Dr Roch Christian JOHNSON
Directeur médical de la Fondation Raoul Follereau
Président, Association internationale de la lèpre
Membre de l’équipe de direction du GPZL Global Partnership for Zero Leprosy
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